Dans une Afrique noire où la femme est traditionnellement reléguée au second plan, des figures historiques de leadership féminin comme ceux d’Abla Pokou en Côte d’Ivoire et des Amazones du Dahomey se distinguent. Dans ce billet de blog, InspireAndShine aimerait vous présenter le portrait d’une femme dont le charisme et les décisions resteront à jamais gravés dans l’histoire traditionnelle de la Côte d’Ivoire et plus particulièrement dans celle du peuple Akan. Reine des Akan et leader historique du peuple Baoulé, principalement situé au centre du pays, Abla Pokou représente une véritable figure emblématique du leadership africain.
Une leader pas comme les autres !
Faisons un bond dans le passé, jusqu’au XVIe siècle, en Côte de l’Or (actuel Ghana). Jeune mère dans un climat de tension et de crise imminente, Abla Pokou doit fuir le destin tragique que lui réserve son oncle, roi des Ashanti. Princesse de Kumasi, au Ghana, Abla est la fille de Nyakou Kosiamoa, sœur de Dakon, successeur malheureux d’Opoku Ware I, et nièce d’Osei Kofi Tutu I, roi redoutable et cofondateur de l’Empire Ashanti au Ghana. À la mort de ce dernier, son neveu doit lui succéder sur le trône, en vertu de la loi matrilinéaire, c’est-à-dire la loi de succession par lignée maternelle.
En effet, chez les Ashanti, l’enfant issu de la sœur d’un roi défunt a plus de chance de succéder à ce dernier que l’enfant d’un frère dudit roi. Au décès du neveu d’Osei Tutu, Dakon, frère d’Abla Pokou, était appelé à régner. Malheureusement, les choses ne se passèrent pas ainsi. Une guerre de succession éclata entre Itsa, un vieil oncle issu de la famille régnante, et Dakon, le frère d’Abla Pokou. Une lutte fratricide s’engagea sans merci, au cours de laquelle Dakon fut tué. Dès lors, Abla Pokou comprit le terrible sort qui l’attendait si elle restait. Elle devait donc s’enfuir vers le nord-ouest avec sa famille, ses serviteurs, ses soldats fidèles et tous ceux du peuple qui se reconnaissaient en elle ou en Dakon.
Sous sa conduite, les fugitifs marchèrent des jours et des nuits, fuyant la meute de poursuivants lancée à leurs trousses. Ils arrivèrent finalement, exténués, devant le fleuve mugissant de la Comoé, une frontière naturelle entre le Ghana et leur prochaine terre d’accueil, la Côte d’Ivoire. Mais les pluies hivernales avaient gorgé le fleuve, le rendant pratiquement infranchissable.
Pour passer le fleuve, la légende raconte qu’un sacrifice devait être fait, un sacrifice de valeur. Pour sauver une multitude de gens, Abla dû sacrifier son fils unique, le petit Kouakou. Lorsqu’il fallut célébrer leur nouvelle patrie, les anciens décidèrent de commencer par les funérailles de l’enfant sacrifié de la reine. C’est ainsi qu’en souvenir de cet enfant, la tribu d’Abla Pokou fut appelée « Baoulé » provenant de la phrase « Ba-ouli » l’enfant est mort. Et que le berceau du peuple Baoulé reçut le nom de Sakassou en Côte d’Ivoire, autrement dit, « le lieu des funérailles ».
Après de longues années d’un règne dont la splendeur fut sans égale dans toute la contrée, la reine Abla Pokou s’éteignit vers 1760. De son berceau d’origine au Ghana à sa terre d’exil en Côte d’Ivoire, sa célébrité n’a été égalée par celle d’aucun autre monarque Ashanti. Le saviez-vous ? La société Baoulé se distingue encore aujourd’hui par le caractère matrilinéaire de sa succession, dans une société africaine généralement patriarcale.
A travers ces billets issues du projet d’écriture « cette Afrique qui m’inspire ! », InspireAndShine se veut de partager des exemples de leadership ayant marqué positivement l’histoire du continent; Des exemples qui inspirent et engagent.